Amour volcanique

 


Amour volcanique


        Le jeune homme s’éloigne alors que la fête bat son plein. Une migraine intense lui broie les tempes, tandis qu’il file entre les arbres du verger pour fuir le vacarme de l’Héphaistie qui se déroule en ville. Déjà qu’il est sensible en temps normal, mais la fête dédiée au Dieu Forgeron met un point d’honneur à faire résonner dans les rues des milliers de marteaux frappant des enclumes. Peut-être les splendeurs des artisans permettront-elles à la ville de prospérer encore une année ? mais pour le moment, il cherche le calme et la tranquillité; or, rien de mieux que les bois pour se reposer en ce début d’automne, où le temps est encore clément et doux.


        Assez rapidement, le jeune homme trouve la paix tant désirée. Le bruissement des feuilles sous le léger vent tiède caresse sa peau, et il se surprend à soupirer, comme si une main tendre venait de frôler son épiderme. Les rayons du soleil sont coupés dans leur chute par la haute frondaison verte à la lueur émeraude; les hauts troncs grincent parfois quand ils sont frappés par une bourrasque puissante. Ses pas le mènent d’eux-même à son endroit favori, une petite lagune cachée au coeur de la forêt, où il a passé l’été brûlant. Dans l’eau, brillante comme un diamant sous le soleil de plomb, ou sombre comme un saphir en fonction des ombres, il profite du calme pour soulager ses maux. Ce paisible endroit fait disparaître ses migraines mieux que tous les sels ou toutes les potions de l’herboriste. Là, plongé dans le liquide pur et limpide, il se sent rechargé, réhydraté, tel une petite fleur assoiffée qui retrouve son éclat ambré.


        Mais cette fois, alors qu’il approche des saules marquants le bord du ruisseau, il ressent que quelque chose est différent. Une douce odeur d’amande flotte dans l’air, mêlée de miel et de vanille. Sans savoir pourquoi, le rouge lui monte aux joues et il trébuche. Lorsqu’il retrouve son équilibre, il continue d’avancer, et perçoit alors une voix d’homme, douce et grave. Même si l’on peut dire sans hésiter que celui qui chante a une belle voix, il est loin d’égaler le talent du jeune homme. Après tout, sa mère le dit béni d’Apollon, le Dieu du chant en personne.


        Discret comme une souris, pour ne pas être vu, le blondinet s'approche jusqu’à découvrir à travers la trouée d’arbrisseaux le cantateur maladroit. Il en reste bouche bée, rien que de voir l’homme de dos : des bouclettes d’or couvrent une tête posée sur des épaules carrés, qui portent des bras sculptés; son dos s’affine sur des hanches fermes, découvrant un fessier rond à souhait. Dans l’eau, les jambes qui supportent cette statue d’éphèbe vivante semblent charpentées et en accord avec le reste du poète en herbe. Sur la rive, un pagne court blanc bordé de tresses aussi dorées que les cheveux est posé à côté d’une ceinture à la boucle en rubis. Un simple couteau courbe dans son étui y est accroché, pendant qu’un arc, probablement en noisetier, repose sur un carquoi de même couleur que le vêtement; des vrilles de lierre dorées, aux feuilles enroulées sur le cylindre blanc, ajoutent à la beauté mortelle de l’objet.


        Le chant s’arrête subitement, et le jeune homme reporte son regard sur le baigneur. Il en rougit derechef, car les yeux verts du bellâtre sont fixés sur lui; son teint hâlé et son torse sculpté éveillent l’appétit du voyeur, tandis que le service trois pièces au repos de l’athlète semble déjà prometteur. Mais la peur d’avoir été découvert prend les tripes du blondinet, et il se met à courir en sens inverse. Il entend derrière lui quelques éclaboussures, discerne comme un claquement de corde, avant de faire un bond en avant, comme si son coeur venait de prendre un coup. Il distingue clairement une exclamation, mais il ne jette pas un regard en arrière et file chez lui, sans croiser un quidam à travers le verger. Il cavale et finit par se cacher dans la cave de la demeure; seul un son étouffé lui parvient depuis la rue, il distingue bien plus distinctement les battements affolés de son coeur. Ils continuent d’ailleurs à masquer les autres sons alors que plusieurs heures se sont écoulées, car son esprit n’arrive pas à ôter de ses pupilles la divine vision du nageur.


        Nul ne faisant attention à lui, il se prépare pour retourner sur le lieu du “crime” afin de revoir le bel inconnu. Il décide cependant d’emporter quelques provisions avec lui. Qui sait combien de temps il va devoir attendre avant d'apercevoir à nouveau le beau blond ! Malgré la nuit, de nombreux feux sont allumés, la fête bats son plein. Discret comme une ombre, il évite les fêtards et retrouve les bois sans croiser âme qui vive, en dehors d'un chat roux aux yeux marrons qui lui donna l'impression de lire dans son regard comme dans un livre ouvert. Le chemin lui paraît interminable, et c'est presque avec un soulagement qu'il retrouve l'eau sombre sous la Lune. Il entre dans le miroir liquide, sans se soucier d'ôter ses habits, et rejoint l'endroit où de mémoire devaient se trouver les effets du blond. Sous le clair de lune, il croit reconnaître un minuscule amandier en place de la toge incroyablement blanche, à tel point qu'il se demande s'il n'a pas rêvé la rencontre, ou embellit la réalité. Alors, il finit par s'allonger et s'endort, tout en prenant garde à ne pas écraser la petite tige verte.


        Un doux zéphyr à l’odeur sucrée le réveille alors que le soleil est presque à son zénith dans le ciel, à l'approche de midi. Sur une pierre plate, à l’autre extrémité de l’étendue humide, se trouve celui qu’il voulait voir, dans une posture aguicheuse. Il se redresse d’un coup, et se prend une branche contre la joue; l’arbrisseau est désormais un grand buisson, avec quelques fruits en train de mûrir.


        – Salut, comment t’appelles-tu ?


           – Rémus, et toi?


        – Je te laisse deviner. C’est plus amusant comme ça ! Et si tu as raison, qui sait ce que tu peux gagner…


        Les yeux d’émeraude pétillent et se plissent, coquins, tandis qu'une délicieuse odeur vanillée se répand dans l'air. Le sang bourdonnant à ses oreilles, Rémus laisse courir un regard plein de désir sur la bosse couverte par le tissu immaculé de son interlocuteur. Il relève la tête sur les parfaites bosselures abdominales, se perd sur le visage de poupon masculin et parfaitement lisse. Son coeur bat la chamade, et c'est sûr de lui qu'un nom quitte sa bouche, d'un langoureux soupir :


Éros…


Les ailes de l'ange se déploient et il s'envole jusqu'à atterrir sur les genoux du jeune homme. L'odeur délicate s'intensifie encore, et le frêle Rémus tend ses lèvres pour goûter à celles, roses, charnues et attirantes, du Dieu de l’Amour.


Ma flèche t'a bien atteint, mais je ne pensais pas qu'elle me frapperait en retour…


La main du Dieu se pose sur la joue du jeune homme, tendrement, puis il penche la tête et approche jusqu’à sceller ses mots par un tendre baiser. Durant les quelques secondes où leur pulpe reste soudée, ils ressentent un torrent d’émotion, de la joie à l’amour, en passant par le désir. Autour d’eux, des centaines de glaïeuls, perce-neige et primevères sortent de terre. Chaque battement de leur coeur, à l’unisson, engendre une nouvelle plante, et recouvre la berge d’une marée florale. Une autre tige se gorge de sève lorsque leurs corps se frottent l’un contre l’autre, et qu’ils s’allongent sur l’étendue colorée pour assouvir les fantasmes qui dévorent désormais leurs esprits en proie à un amour terriblement puissant.


Rémus découvre avec une excitation intense le corps du divin blond. Il caresse ses courbes délicates, sa peau d’une exquise douceur, sculptée à la perfection dans le marbre le plus dur et le plus confortable qui soit. Il se découvre sensible dans des endroits qu’il n’avait jamais exploré, lorsque les mains de son incroyable amant glissent sur son épiderme fiévreux. Lui se décide à dévorer les tablettes de chocolat blanc, parfaitement visibles sans être trop massives, avant de remonter sur les tétines aussi charnues et carmins que les lèvres tentatrices. Après les avoir suçotées et entendu résonner la douce mélodie du plaisir dans la bouche d’Eros, il remonte embrasser ses lèvres avant de retourner son partenaire, tandis qu'il le déshabille totalement.


Le sexe du dieu, sans être énorme, est plus long et large que la moyenne - chez les mortels du moins. Il n’en a jamais vu une si belle et si grosse dans les gymnases; il se laisse mettre dans le plus simple appareil et découvre son sexe, plus court mais à peine moins large, et alors qu’il descend pour goûter à la délectable friandise, le coquin le fait chuter sur le côté, afin de lui donner aussi du plaisir. Il découvre donc à la fois la merveilleuse sensation de sucer et d’être sucé, apprécie tout à la fois la bouche chaude sur son sexe autant que la barre de chair douce, qui crache des perles délicatement salées à intervalle régulier. Il se met également à aimer la sensation d’avoir la bouche remplie, sans avoir les lèvres trop distendues par la pine généreuse. Novice, il copie les gestes d’Eros et prend quelques initiatives, comme de palper les bourses glabres, alors que sa langue passe tour à tour sur la pointe du gland, sur la couronne marquée, ou le long de la hampe généreuse. Et même s’il n’arrive pas à prendre le divin pénis dans son intégralité, contrairement au sien, avalé sans difficulté, qui lui transmet des décharges de plaisir et floute sa vision, il y reste accroché et aspire, lèche, montrant ainsi sa dévotion envers l’Amour. Au point que lorsqu’il approche de la jouissance, malgré une vaillante résistance, et qu’il cesse de pomper le dard gonflé à l’extrême, il croise le regard excité et les joues rouges de son ange personnel au bord de l’explosion.


Ils se reconcentrent donc sur les glaives bouillants, et sous le coup du plaisir, Rémus attrape les cuisses d’Eros pour s’empaler la bouche tout en palpant ses miches rondes comme seules peuvent l’être celles qui ornent le postérieur d’un Dieu de la Sensualité. Un cri de plaisir étouffé par son propre sexe lui parvient, son amant apprécie la manoeuvre, au point de lui donner quelques coups de bassin alors que ses doigts suivent l’arrondi des collines jusqu’à l’entrée de la petite caverne. Un frôlement à son entrée suffit à déclencher l’apothéose : son propre sexe entortillé par la langue du blondinet, il se met à jouir sous le coup du plaisir et de l’excitation provoquée par la propre explosion juteuse qu’il se prend en bouche. Immédiatement, il se sent ivre, sans tous les mauvais côtés que l’alcool apporte; il se sent plein d’énergie, plus qu’après une bonne nuit de sommeil. Il n’a désormais qu’une envie, continuer à aimer ce partenaire idéal, qui lui donne autant d’Amour et de plaisir que son coeur peut en supporter.


Ton sperme est aussi doux que le Nectar qu’on boit sur l’Olympe.


Le tien c’en est non? Vu que tu es un Dieu.


Non, mais a priori tu y es très sensible. C’est parfait, on va pouvoir s’amuser tous les deux, surtout que tu es endurant. Je crois qu’on va tous les deux vénérer quelque chose…


Le Dieu fait un clin d’oeil à son Amour humain avant de l’entraîner dans l’eau pour qu'ils flottent ensemble. Le soleil chauffe leur peau d’ivoire, et un coup d’oeil sur l’autre suffit à relancer la flamme du désir. Comme deux bateaux, les mâts se dressent, ils rejoignent rapidement la pierre plate pour continuer leurs ébats, qui reprennent très tendrement. Ils échangent de nombreux bécots, tout en partageant une cajolerie d’une tendresse intense. Leurs yeux sont brillants et ne se lâchent pas en dehors d’un clignement, tandis que serrés comme s’ils devaient fusionner, ils s’effleurent voluptueusement.


Eros est le premier à glisser sa main sur l’entrejambe de Rémus. Il attrape les deux sexes et les branle quelques instants, suffisamment pour recouvrir de mouille la hampe du jeune mortel. Puis le regard vert se plisse, affamé, et avant qu’il ne puisse réagir, il découvre une nouvelle sensation, celle d’une chaleur extrême autant qu’elle est douce et humide. En quelques instants, il est totalement sous l’emprise du plaisir, et il ne souhaite rien d’autre qu’en donner autant à celui qui domine désormais son coeur, son corps et son esprit. Dans une demi-conscience, il renverse son parfait aimé et commence à donner de longs et lents vas-et-viens, qui accélèrent petit à petit. Il ressent une intense satisfaction d’à son tour voir un plaisir indescriptible se peindre sur la figure de porcelaine, et l’Idéal Divin augmente son excitation en se mordant la lèvre tout en glissant son bras derrière sa nuque, peignant sur la rétine du jeune homme une image des plus lascives. Il l’attire ensuite contre ses lèvres, absorbe ses sens, au point de ne plus sentir que la barre de chair entre ses cuisses qui entre et sort à vive allure dans le corps merveilleusement provocateur et stimulant.


L’ange se relève, s’envole avec son compagnon et se pose dans le champ de fleurs. Il présente ensuite son affolant derrière, utilisant comme un lit l’amandier orné d’inflorescences. Sous une impulsion due à la position de l’aguicheur, il se décide à goûter ce baba ambroisé, ce qui lui vaut forces encouragements et onomatopés de bien-être. Mais une demande expresse de remplacer sa langue - certes agile - par son sexe le fait revenir au chaud. Il s’empresse alors de réintégrer l’espace si accueillant pour son glaive, et n’oublie pas de venir frotter la zone où il a découvert une petite boule qui fait hurler des “oh ouii encore !” à son bel amant.


Malgré les mouvements de bassin et le torse contre son dos, Eros se contorsionne pour embrasser ce pâle humain qui réussit à satisfaire un Dieu. Malgré la difficulté à ne pas se cogner les dents, il soude ses lèvres à celui de son tendre compagnon, pour partager avec lui la jouissante luxure qu’il ressent. Le mélange de sensation, voilà la goutte qui fait déborder le vase de leur plaisir : un frisson le parcourt des pieds à la tête, tout son corps se contracte, et dans cette décharge érotique leur liqueur masculine se répand. Immobilisé dans son fourreau, Rémus soupire son plaisir, et prononce les premiers mots qui lui viennent à l’esprit :


Je t'aime

Je t'aime d'Amour

Je t'aime toujours

Pour la vie

À la folie

Mon ange, mon coeur, mon chéri.

Il s’écroule ensuite dans les bras du Dieu de l’Amour et s’endort, terrassé par l’effort qu’il a fourni. Les premières étoiles s’allument dans le ciel alors que le char d’Apollon quitte enfin la voûte céleste. Un vent léger secoue les branches de l’arbre sur lequel ils sont posés. Le Dieu frôle la mâchoire de l’humain, puis prend sa main pour déceler les fils de sa vie. Insatisfait, et surtout ne voulant pas le perdre, il se penche sur ses affaires et en sort un peu d’Ambroisie, qu’il glisse dans la bouche du dormeur après avoir déposé un ultime baiser sur ses lèvres mortelles… Demain, à son réveil, elles ne le seront plus.

 

***

 

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