Aux sources du rêves

 


Aux sources du rêve


Je m’étais toujours demandé comment l'on avait pu oublier la magie, pendant plus de mille cinq cents ans. L’espèce humaine, incapable de voir, d’entendre, de percevoir au-delà de ses cinq sens. Les sciences et la technologie prioritaires sur le bonheur, et le Capitalisme en nouvel Ordre Mondial.


Lorsque je remontai le long fleuve, ou plutôt l’arbre de vie de mes ancêtres, je découvris qu’ils avaient tous possédés des capacités hors du commun. Même au cours des périodes où ils n’utilisaient pas consciemment leur Don, ils gardaient en eux cette magie, un sixième sens qui se traduisait par des rêves, une vision supérieure, et un apaisement bienvenu sur ceux qui les côtoyaient.


En étudiant les ancêtres de mes compagnons de voyage, je me suis aperçu que la théorie de la réincarnation s’avérait la plus probable pour expliquer les liens entre nos familles, à travers les millénaires. Du Paléolithique, à l’Antiquité, en passant par le Moyen Âge et le Monde Moderne, nous fûmes toujours liés, quoique nos rencontres se montraient parfois fortuites - plusieurs Princes épousèrent des nantis ! Mais la plus extraordinaire conjonction fut probablement celle que vous vous apprêtez à lire.


En l’an de grâce trois-mille vingt-et-un, notre bonne vieille planète Terre n’était plus que l’ombre d’elle-même. L’humanité, d’abord affaiblie par ses épidémies puis par ses guerres, ne s’était pas relevée. Les Grandes Compagnies, seules victorieuses des temps incertains, prirent le contrôle total sur le système. La main-d'œuvre travaillait en silence, tandis que la Haute Société profitait de sa bonne fortune, détenue par elle seule. La résistance quitta ce système pourri jusqu’à la moelle, profitant de la folie d’un multi-milliardaire, pour qui la conquête spatiale ne représentait qu’un moyen de s’enrichir encore plus. Et si, au départ, le projet s’avéra être une réussite - tout du moins pendant quelques dizaines d’années, tout au plus quelques siècles - les envahisseurs se virent envahis à leur tour. Vénus, Mars, Mercure furent repris par les Neptuniens et l’ancienne Alliance Rebelle.


Jamais l’on ne connut une si grande guerre; les morts se comptèrent par milliards, d’un côté comme de l’autre. Les technologies se complexifièrent, de même pour les esprits. Ceux qui ne voulurent pas devenir des maîtres devinrent serviteurs, esclaves des mondes qui s’ouvrirent à l'horizon. La loi du plus fort se mit en place, raflant parmi le bétail humain ceux qu’ils désiraient. Que ce soit sur notre bonne vieille planète bleue ou dans l’Ether, l’Enfer attendait l’essentiel de notre espèce. Si j’y restais attaché, c’était par ma naissance, dans une vieille colonie surpeuplée de l’ancienne Europe.


Avant notre majorité, nous n’avions pas plus de considération qu’après. L’enfance était la seule période où l’on pouvait encore profiter d’une “douceur de vie”, quoiqu’on inculque obéissance et respect entre deux leçons de lecture et d’écriture. Au-delà de quinze ans, des Faucheurs venaient parfois chercher de jeunes esclaves, à la chair tendre. Finir dans l’estomac d’un gourmet était ma foi la fin la moins cruelle que l’on pouvait souhaiter, toujours plus agréable qu’une vie de servitude dans n’importe quelle mine, usine, vaisseau que les galaxies contenaient. Je ne parlerai même pas des “danseurs” qui devaient subir les attouchements intimes les plus variés, de la part d’humains se croyants tout puissants, ou bien d’aliens aux formes plus ou moins ragoûtantes.


Je vécus donc jusqu’à mes seize ans avec la peur de finir danseur: ma mère me répétait souvent que les jeunes hommes ou femmes, à l’allure exotique, extraordinaire, étaient choisis en priorité. Elle maudissait le jour de ma naissance, regrettait d’avoir donné la vie en ce monde à son “petit prince roux”. La seule chose qui me cachait était de larges vêtements et de la suie sur mon visage, mes cheveux quant à eux se montraient rétifs à toute tentative de coloration.


La vie dans les bas-fonds d’une société décadente et brisée n’avait rien à voir avec l’opulence que les jours anciens connaissaient malgré leurs crises. La crasse recouvrait tout, que ce soit sous forme de rouille, de moisissure, d’huile de vidange. Les déchets organiques ou métalliques cachaient une faune adaptée à ce nouveau monde, mais diminuée, transformée elle aussi par la pollution humaine. Ils n’étaient pas rare de voir les hommes ou les animaux naître avec de nombreuses malformations. En être exempt représentait à la fois une chance et un malheur - on devenait en grandissant un met de choix pour les Faucheurs.


Assurément, la magie coulait dans mes veines; plus d’une fois, j’avais connu des rêves prémonitoires. Plus d’une fois, j’avais senti à travers mon interlocuteur une anormalité qui m’encourageait à la fuite. Je n’osais pas en parler, à l’époque, certains que cela me vaudrait d’être choisi avant même mon âge d’homme. Je cultivais en silence cet art, utilisant charmes et sortilèges en toute discrétion, pour voir se réaliser mes délires oniriques de voyage stellaire. J’échappais plusieurs fois à des rafles organisées par quelque forme d’aliens camouflés sous apparence humaine. Il ne faisait jamais bon terminer entre les griffes ou tentacules de plutoniens, ni même comme porteur d’un neptuniens - quoiqu’on disait qu’après un accouplement intense et appréciable, la fin était rapide. Plusieurs élèves de l’école supérieure, que je continuais de fréquenter malgré ma majorité approchante, finirent malgré eux dans des bordels aux confins des galaxies, ou dans une “ferme”, afin de procréer encore et encore, puisqu’ils n’étaient pas atteint de dégénérescence physique ou intellectuelle.


Je me souviendrais toujours de ma rencontre avec Edward - ne me demandez pas comment un Neptunien pouvait avoir un prénom qui datait du deuxième millénaire, voire antérieur. Désormais presque un homme, malgré mon apparence délicate et juvénile, je ne pouvais pas éternellement me cacher. Les Faucheurs avaient plus que les yeux ou l’odorat pour sentir à qui ils avaient à faire. Dans mon malheur, ceux qui me récupérèrent faisaient partie de l’Alliance Galactique Libre; l’indépendance de ce groupe était assuré par les missions d’intérêts général qu’ils accomplissaient de temps à autre pour les groupes dominants, preuve qu’une certaine soumission à l’Ordre Capitaliste était nécessaire pour avoir son libre arbitre.


Un matin donc, alors que je me préparais à une nouvelle journée de cours, la porte de notre taudis s’ouvrit. A la porte se tenait un neptunien : près de deux mètres de muscles, ses antennes auditives placées comme des oreilles sur sa tête, un visage doux mais sûr de lui, une peau ornée de points bleus plus foncés sur son menton, entre ses pectoraux nus, et autour de son nombril avant de disparaître sous un simple pagne, blanc et doré. Nous n’avions pas besoin de beaucoup de connaissances sur les coutumes des autres peuples pour comprendre que ce grand humanoïde bleuté, suivis de nombreux gardes totalement armurés, était de la famille royale.


Ma mère se jeta à genoux devant le Prince - s’il était le roi de Neptune, il aurait porté les épaulières à l’insigne de sa planète - et supplia de ne pas prendre son fils. Le plus souvent, quand de telles apparitions se faisaient, c’était pour enlever les plus beaux spécimens, qui finissaient alors dans des temples de luxure que seuls les plus fortunés de l’univers pouvaient s’offrir. Mais le Prince l’ignora et s’approcha de moi. Un sourire satisfait éclaira son visage lorsque, pour ne pas qu’il me touche, je projetais une nuée d’étincelles enflammées, tirée de notre vieille lampe à pétrole.


N’aie pas peur, je ne te veux aucun mal.


J’entrevis dans ses yeux une lumière frémissante, sa voix douce heurta mon cœur avec la douceur d’une plume. Se retenait-il de pleurer?


J’appris par la suite que je n’étais pas seulement doté de capacités extraordinaires, mais d’une odeur et d’une apparence, en dehors de ma chevelure, qui rappelaient à ce bel Alien son amour humain. Mais sur l’instant, je me laissais envahir par l’apaisement; son regard faisait s’évanouir mes peurs, et je laissais sa main frôler ma joue avant de s’y poser. Ce premier contact tendre laissa ma mère sans voix, elle qui connaissait certes mes attirances masculines - sans jamais avoir sauté le pas - mais aussi ma difficulté à me laisser toucher. Or, là, je me laissais complètement aller contre cet inconnu au corps ferme et gazeux.


Je fis mes valises, pris mes grimoires, pots, et autres ustensiles indispensables, que je ne voulais pas laisser derrière moi. Je tentais de convaincre ma mère de venir, avant de céder à son refus lorsqu’un flash me vint : si je l’emmenais avec moi, elle aurait une vie bien plus malheureuse qu’ici. J’en eus la confirmation dès que nous passâmes la ceinture d’astéroïdes après Mars : des pirates de l’espace harponnèrent le vaisseau, et je fus capturé à peine après avoir quitté ma planète.


Je ne prêtais pas attention à l’équipage hétéroclite, seulement à la destination : sans les connaissances accumulées au fil des années, je n’aurais jamais obtenu de renseignements de mes geôliers. Nous étions en route pour une ferme de reproducteurs, idéalement abritée sur l’une des Lune de Jupiter, où je découvris avec horreur le sort des humains. Dans un premier hangar, des rangs dénudés de femmes ou d’hommes, engrossés par toute sorte d’espèce compatible - notamment afin de se procurer avoir de la chair fraîche humaine pour travailler ou jouer avec - et dans un autre, des rangées d’hommes tout aussi nus, mais au sexe raccordé à une espèce de trayeuse, qui ne leur laissait aucun de répis. Pour ma part, en attendant la décision de mon utilité, je fus enchaîné et parqué dans un enclos, avec d’autres compagnons d'infortune.


Suivant mon instinct, je me laissais sombrer dans le sommeil, où je rêvais d’Edward. Je lui donnais ma position, puis aussi brusquement que je m'étais endormi, je me réveillais, à la stupeur de ceux qui m’entouraient. Ils furent une fois de plus surpris quand mes chaînes et les leurs tombèrent, mais ils ne perdirent pas de temps et essayèrent de s’échapper.


Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ils ne firent pas preuve de solidarité, et ce fut probablement ce qui entraina leur perte. Quelques-uns atteignirent le hangar à vaisseaux, mais on sonna l’alarme. En moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire, ils furent recapturés, mais cette fois conduits dans des salles mieux gardées. Quant à moi, j’arrivais à me cacher dans l’ombre de deux jeunes hommes, dans le hangar de production de semence, qui contrairement à ceux que j’avais libéré, firent ce qu’ils pouvaient pour m’aider.


Il fallut de nombreux enchantements pour désincarcérer ceux qui devinrent mes compagnons de voyage; même si l’alerte était levée, les esclavagistes restaient sur leur garde. A nous trois, nous n’en échappâmes que de justesse, surtout grâce à l’arrivée d’Edward, faux acheteur, qui repartit avec les plus beaux spécimens de la ferme sans rien payer - et en laissant quelques morts.


La confiance était désormais gagnée, et trois membres d’équipage rejoignirent celui de ce Prince banni, qui tenait en trop grande estime les terriens. Chacun d’entre nous à sa manière se montra utile : le plus grand des deux, un brun au charme ravageur nommé Tomaz, était aussi grand qu’Edward, et au moins aussi musclé. Ses talents étaient mécaniques, il montra son utilité sur de nombreux objets qui devaient être réparé. L’autre, un blond tout aussi éblouissant de beauté, Damïz, se révélait navigateur hors-pair. Et moi… je mis ma magie au service de notre Prince commandant, voyant à l’avance les coups du sort. Je développais mes capacités en toute liberté, sans être jugé, sans risque, tout en étant respecté et respectueux.


Je passais beaucoup de temps en compagnie d’Edward, qui à défaut de se laisser toucher plus de quelques instants - la salive et la sueur des neptuniens contenaient des substances aphrodisiaques - s'ouvrait émotionnellement. Il allait sans dire qu'avoir plus de cinq sens entraîne également de plus subtils et plus complexes sentiments, et je sentais tout à la fois qu'il était apaisé, heureux et attristé de nos échanges. Tomaz et Damïz aussi venaient passer du temps avec moi, et c'est lors d'une séance de lecture de l'avenir que je décelais nos liens à travers les âges. Aussi étonnant que ce soit, alors que je me sentais plus proche de Damïz, c'était avec Tomaz que j'avais le plus souvent partagé ma vie. Je me gardais cependant bien de le leur révéler, le futur comme le passé n'étant pas toujours bons à connaître.


Eux par contre n’hésitaient pas à se confier à moi, tout au long de nos cajoleries; je ne me voyais pas, malgré l’attirance physique que je pouvais ressentir pour l’un ou pour l’autre, passer le cap d’une relation charnelle. Le contact le plus proche restait donc celui de “frères”, si tant est que deux individus d’une même famille aiment se laisser aller l’un contre l’autre et se faire de petits bisous dans le cou, sur les joues, le front… Je sentais bien que ce comportement amusait Tomaz, qui, dès qu’il se retrouvait seul avec moi, me lançait un “viens dans mes bras mon petit Bébz”, un grand sourire charmeur sur les lèvres.


Jamais ces deux garçons ne me demandèrent quoi que ce soit de sexuel, bien qu’ils aient des attributs ma foi forts virils, comme j’avais pu le constater en les délivrant. Même s’il arrivait à Tomaz de bander - j’étais peut-être puceau mais pas stupide, je me rendais bien compte de l’effet que j’avais sur lui - il ne tentait rien et son pantalon retrouvait progressivement une taille normale. Comme quoi, finir dans un ranch reproducteur traumatisait même le plus sexuel des gentils pervers!


Plus le temps passait et plus je m’ouvrais à mon tour à mes camarades, de manière totalement différente avec les deux. Je gardais cette sensation d’être connu sous tous mes aspects, comme un double de moi-même, par Damïz. Tomaz, lui, faisait accélérer mon coeur, et nous passions des heures accrochés l'un à l'autre. Ses mains, délicieusement baladeuses, ne manquaient jamais d'entraîner des réactions charnelles, mais je me maîtrisais, effrayé, lorsque je repensais à la pine d'étalon entre ses cuisses - qu'aucun des pantalons qu'il mettait ne pouvait vraiment masquer.


Malheureusement nous ne pûmes profiter bien longtemps de notre relation naissante. Une mission un peu dangereuse, un peu d'imprévu, un sorcier maléfique… je sauvais in extremis le reste de l'équipage, et nous mirent le cap sur la Galaxie d'Andromède, où nous pourrions remettre à sa place l'oeil de Jupiter ; cette relique essentielle au soleil presque mort, maintenu en vie grâce à une technologie prismatique, permettait aussi à Andromède de conserver une trajectoire parallèle aux galaxies proches habitées, pour éviter leur annihilation. Pour ma part, j'aurais volontiers échangé aux fanatiques d'une religion décadente cette Pierre, que nous leur avions pris en échange de mon Tomaz.


Si je ne pleurai pas les premiers jours, alors que je le voyais en rêve, prisonnier aux côtés d'un jeune homme maigrichon, au visage si tendre qu'il inspirait immédiatement l'image d'un chaton, un sentiment de perte et de raccourcissement des heures à vivre me saisit : même s'il ne nous fallut pas énormément de temps pour rejoindre le coeur d'Andromède, à la vitesse de la lumière, j'avais l'impression de sentir la vie m'échapper, comme une blessure ouverte d'où s'écoulait à flot mon sang carmin.


Se déplacer dans un espèce de temple grec de l'Antiquité, au cœur même de l'étoile mourante, était le dernier de mes soucis. Le sens de mes visions m'échappait, j'entrevoyais des géants chutant à travers les couches atmosphériques d'une Terre primitive, mêlé à un Amour incroyable pour Tomaz que je n'avais pu concrétiser. Je ne prenais pas garde à plusieurs signaux essentiels, et nous précipitais dans un guet-apens. Incapable de me concentrer, d'utiliser mes pouvoirs, nous fumes fait prisonniers à notre tour, par les même adorateurs de divinités anciennes. Je les reconnaissais aux nombreux étendards, représentation de deux hommes enlacés, dont l'Union était source d'un soleil éclatant.


Alors que nous étions conduit le long de grands couloirs marbrés et décorés de légendes du passé, nous pouvions entendre des voix qui scandaient un rituel ancien. Plus le son se rapprochait, plus j'étouffais, des frissons me saisissaient. Je voyais Damïz dans le même état à mes côtés entre deux retours au présent; j'étais dans un état second, l'esprit dans une vaste salle illuminée, dans lequel je voyais mon aimé et son compagnon d'infortune. Lorsque ma vision me montra un couteau rituel s'abattre sur les deux hommes, je sombrais.


Je repris conscience alors que mon cœur battait une chamade totalement affolée. J'avais envie de dégobiller, j’avais chaud, puis froid. Mes yeux brouillés de larmes fixaient sans la voir la gemme rouge, l'œil de Jupiter, qui flamboyait. Une énergie la parcourait, l'air s'était réchauffé, comme si l'étoile mourante reprenait sa forme originelle.


"Ne crains rien, nous serons bientôt réunis, Amour"


Cette phrase qui résonna dans ma tête confirma ma folie, qui devenait difficilement gérable depuis l'enlèvement de Tomaz. Je ris, et ne cessais qu'en débouchant dans une immense salle ouverte au centre du Soleil, aux piliers de marbre lisses. De lui-même, l'œil de Jupiter flotta jusqu'à son centre. D'étranges miroirs réfractèrent la lumière qui devenait éblouissante, tandis qu'un rideau d'énergie empêchait la chaleur de l'étoile, à nouveau en pleine possession de ses moyens, de nous consumer.


Un homme, tout de rouge vêtu, s'avança vers moi, sans ignorer mon acolyte blond. Alors que de nombreux autres fidèles en gris continuaient de psalmodier, il s'exprima :


Ô Grand Dieu créateur, permet moi de te saluer, moi ton plus fidèle serviteur. Que Ton règne mortel s'achève enfin. Que ton amour soit éternel, et nous apporte gloire et prospérité ! Je me prosterne devant Toi, humble et repentant! Pardonne mon audace de t'ôter la vie, comme celle de ton âme destinée !"


Je jetais un regard hautain sur ce méprisable être humain, qui croyait obtenir mes faveurs en me couvant d'un regard gourmand. Mes yeux furent cependant rapidement attirés par la rivière de sang rubis et leurs propriétaires, égorgés comme des cochons. Damïz se mit à crier :


Laissez Bebz tranquille !


Le prêtre se tourna vers lui :


Veux-tu prendre sa place?


Oui, mais libère-le, ainsi que notre capitaine et ses hommes!


Il sera fait selon Tes ordres! Ta Volonté est mienne, qu'elle soit réalisée !


Désarmés mais libérés, nos compagnons assistèrent impuissants à l'avancée de deux initiés, armés de dagues en obsidienne, sanglantes. Le prêtre, déchaîné, continua :


J'ai réalisé Tes vœux! Je te rends grâce, Ô Tout Puissant ! Rejoins Celui qui est Tient, et déchaîne Ta fureur destructrice sur Tes détracteurs, sur ceux qui se déclarent Tes maîtres, ou les miens!


Un éclat d’énergie rubis éclata dans la salle, en même temps que les dagues volèrent. Mes yeux fixèrent ceux de Damïz, dont le torse se paraît de sang rouge. Mais alors que je sentais mon enveloppe se refroidir, vidée de la chaleur sanguine, je fus attiré par la pierre rougeoyante. Je fermais quelques instants les yeux pour les rouvrir sur un mince filet de poussière doré, qui allait de la pierre, désormais sous mes pieds, aux corps Roux et Blond flasques. Je pris une longue respiration. Je me sentais à nouveau complet, je me souvenais de tout : de mes vies humaines, mais surtout de l’avant. Lorsque…


"Damalien, mon Amour !"


Au-dessus des corps exsangues de ce qui était Tomaz et l'autre jeune homme, se tenait Thamatos. Je flottais dans ses bras pour l'éteindre ; cela faisait si longtemps ! Et en même temps nous venions de nous quitter, le temps étant relatif pour nous.


Je lançais un regard sur l'Assemblée, qui fixait l'œil de Jupiter sans sembler s'apercevoir de notre présence. Je les regardais, sentais une colère monter en moi : contrairement aux premiers croyants, qui avaient gardé nos reliques pieusement, et veillé à répandre Amour et tolérance à travers les millénaires, ceux-ci ne voulaient que nos faveurs. D'un claquement de doigts, je fis disparaître nos amis dans notre dernière vie mortelle, afin de les conduire en sécurité, à l'autre bout de l'univers, avant de rayer des cartes célestes le Soleil d'Andromède et ses impies.


Une fraction de secondes plus tard nous observions nos ex compagnons décontenancés de leur saut spatial, toujours en vie. Thamatos approuva mon choix et ramena des morts l'humain dont Edward avait été amoureux, tandis que je leur expliquais rapidement ce qui s'était passé, et assurait de notre bénédiction l'Alliance Galactique Libre, grâce aux artefacts magiques que j'avais rassemblé sous l'apparence de Bebz. Ils ne purent résister que quelques minutes à la puissance que je dégageais, ce qui se révéla suffisant. Ensuite, je pris la main de mon Divin Compagnon, qui me conduisit dans une partie de l'Univers, encore vide de corps célestes. Je fixais ses pupilles quelques instants avant de chuchoter :


Bon, et si maintenant nous mettions à profit ce que nous avons appris parmi ces mortels?


Une étincelle de désir enflamma le regard de Thamatos. Il se colla à moi. Notre nouveau règne éternel s'annonçait plus intense que le précédent…


Quelques jours plus tard, l'Alliance Galactique Libre capta un signal inconnu; il les conduisit dans une galaxie au Soleil éclatant, qui possédait plusieurs planètes. L'une d'elle était semblable à la Terre, luxuriante comme aux premiers jours de la Création, et qu'ils nommèrent par intuition Milu. Là, ils vécurent heureux, et leurs descendants après eux, ainsi que tous ceux qui suivaient la voie des Dieux Créateurs.

 

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